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Mercredi, le 31 janvier 2024
Gyros et salade grecque
Je suis de ceux qui ont grandi avec la série télévisée d’animation franco-japonaise Ulysse 31. Un dessin animé mélangeant mythologie grecque avec de la science-fiction, quelle idée géniale ! Arrivé au collège, je connaissais par cœur le Panthéon grec et un de mes rêves était d’aller un jour à Athènes voir « en vrai » l’un des berceaux de notre civilisation, fasciné par l’héritage que les Grecs antiques nous avaient laissé dans la langue, la philosophie, la politique, la sculpture, le théâtre, l’architecture...
En 2002, inspiré par mes amis de la Gang de Lyon que je retrouvais chaque semaine à un kébab du quartier du Tonkin, je débutais ce blog, j’écrivais ma première nouvelle de fiction qui allait être publiée dans un support professionnel et je terminais mes études en soutenant une thèse de doctorat. Mon travail de recherche n’avait pas grand chose à voir avec mon amour pour l’Antiquité, mais j’avais quand même réussi à glisser dans ma conclusion la citation « Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre » en lettres grecques qui, selon la légende, ornait le fronton de l’Académie de Platon.
En 2002 sortait aussi l’Auberge espagnole de Cédric Klapisch, réalisateur que je ne connaissais pas bien. J’avais loupé le Péril jeune, qui évoquait les années de lycée à une période où je portais encore des couches, au début des années 1970. Mais dans l’Auberge espagnole, j’avais retrouvé un peu de moi : des études effectuées à l’étranger apportant leur lot de rencontres qui allaient marquer toute la vie, une dernière année à l’université avant d’entrer dans le monde professionnel, et j’avais en plus à peu près le même âge que Romain Duris qui incarnait le personnage principal.
En 2005, l’Auberge espagnole connut une suite : les Poupées russes. Dans ce deuxième volet, Cédric Klapisch s’attachait à dépeindre les problèmes professionnels et personnels de ses personnages. Cette année-là, je mélangeais encore mes deux identités, celle de l’enseignant-chercheur (qui ne m’apportait pas beaucoup de satisfaction, vivant une sorte de creux dans mon activité de recherche) et celle de l’auteur, critique et plasticien, avec un article sur le genre steampunk présenté sous mon pseudonyme au colloque La Science-Fiction dans l’Histoire, l’Histoire dans la Science-Fiction de Nice, une exposition de mes sculptures, un projet de nouvelle et la réécriture de mon roman. Au niveau sentimental, je vivais une histoire que je croyais être plus sérieuse que celles vécues jusque-là, mais qui s’achèvera brutalement dans les premiers jours de 2006.
La trilogie de Klapisch s’est poursuivie avec, en 2013, la sortie de Casse-Tête chinois. Les personnages avaient désormais la quarantaine, avec des enfants ou des désirs d’enfants, et la vie devenait ce fameux casse-tête avec les compromis à trouver entre la vie amoureuse, la vie professionnelle et la vie familiale avec l’arrivée des responsabilités parentales. À cette époque, j’étais devenu un jeune papa, mon activité professionnelle de chercheur connaissait un nouveau souffle mais mon activité d’auteur ou de sculpteur s’éteignait peu à peu...
À la mi-avril 2023, c’est sous forme de série télévisée que nous pouvons suivre la suite de cette trilogie. Cette fois-ci, Klapisch suit les aventures à Athènes des enfants des personnages qu’il nous avait fait découvrir dans ses trois films. Mes enfants sont encore trop jeunes pour partir étudier à l’étranger, ils ont l’âge que j’avais quand je regardais Ulysse 31, mais la grande, collégienne, a malgré tout déjà des projets en ce sens... Cette série résonne encore fort en moi : un peu de nostalgie, et le regard porté sur l’avenir qui retourne au passé, en se disant que l’on a sans doute davantage vécu d’années qu’il n’en reste encore à vivre. Et puis, ma première grande conférence en présentiel post-confinement avait eu lieu justement à Athènes, en juin 2022, non loin de l’Acropole. Une musique revient sans cesse dans ma tête, la chanson « O Pio Kalos Tragoudistis » :
Γεια σου, γεια σου
ποιος σου έκλεψε ας ξέραμε τη χαρά σου...

Klapisch a appelĂ© sa sĂ©rie Salade grecque. Je lui aurai plutĂ´t donnĂ© comme titre Gyros, le fameux « sandwich grec », l’équivalent du chawarma arabe ou du döner kebab turc, et qui dĂ©signe la rotation de la broche de viande qui se fait rĂ´tir. Dans l’Auberge espagnole, des Ă©tudiants vivaient un bouillonnement d’expĂ©riences, et dans Salade grecque, les expĂ©riences sont vĂ©cues par leurs enfants... La boucle est bouclĂ©e, c’est-Ă -dire un cercle, qui se dit en grec : γύρος, gyros.


Mercredi, le 9 mai 2018
Intelligence artificielle et salade russe
Hier soir, sur le site de l’Université Lyon 3, a eu lieu le débat de clôture de Pop’Sciences Forum : « Intelligence artificielle, demain commence aujourd’hui ». Après une présentation d’Olivier Nerot sur les difficultés à tracer des frontières entre le vivant et le non-vivant, ce dernier a été rejoint par Jean-Claude Dunyach et Sylvie Allouche pour une table ronde. Après un démarrage troublé par le robot dinosaure de la fille de Nerot, les différents intervenants ont présenté leurs visions du futur de l’IA. Le débat a assez vite dérapé pour passer trop rapidement sur les points intéressants du sujet (qui sont revenus brièvement dans les remarques et les questions de la salle, à la toute fin) pour aborder des sujets assez éloignés tels que le transhumanisme, la notion de singularité ou la vallée dérangeante...
À titre personnel, c’est plutôt le transhumanisme qui me dérange. Je préfère de loin la vision de Joël de Rosnay sur l’hyperhumanisme.
C’est du moins ce que je vise dans mes propres travaux de recherche dans le domaine de l’IA où la finalité est de favoriser la diversité (en particulier au niveau culturel), de croiser les regards (entre les différentes disciplines scientifiques), de s’ouvrir aux autres… bref, d’être plus humain.
Mais bon, cette soirée aura quand même été l’occasion de revoir quelques membres lyonnais de la Gang : Sylvie Lainé et Nicolas Le Breton. Il faut dire que le groupe a un peu explosé avec les départs des uns et des autres aux différents coins de la France (en région parisienne, au sud, au nord, dans l’ouest), voire dans le reste de la francophonie (Suisse, Canada).
Tiens, petit message personnel à celui qui fut le Capitaine de la Gang, le désormais bordelais André-François Ruaud qui travaille dans la traduction de l’anglo-russe des mémoires d’un certain détective : hier après-midi, je n’ai pas pu me rendre chez moi et j’ai dû faire un gros détour parce que le Prince Charles et la duchesse Camilla sont allés faire des dégustations à quelques pas de chez moi, aux Halles Bocuse. Quel rapport avec l’intelligence artificielle ? A priori aucun si ce n’est qu’au cours de son histoire, l’IA a connu de nombreux « hivers ». Un exemple frappant présenté comme un échec de l’IA concernait les problèmes de la traduction automatique (il faut remonter au temps de la guerre froide et à l’époque où la DARPA finançait largement les laboratoires de recherche en IA aux États-Unis). Une phrase en anglais telle que « l’esprit est fort, mais la chair est faible » passée de l’anglais au russe, puis du russe à l’anglais revenait sous la forme de « la vodka est forte, mais la viande est avariée ! »


Mercredi, le 13 septembre 2017
Alien : Covenant, c’est toute ma vie
La semaine dernière, ma vie ressemblait beaucoup trop à Alien : Covenant.
Tout avait commencé par des collègues croisés dans les bureaux. La période des vacances estivales ressemble vraiment à une sorte de grand sommeil dans les habitudes professionnelles, avec au réveil quelques personnes qui ne font plus partie de l’équipe (néanmoins celles-ci connaissent un sort plus enviable que celui du commandant de bord du film de Ridley Scott). Grosse responsabilité sur nos épaules : même si nous ne transportons pas des milliers de passagers en hibernation, nous avons à notre charge des centaines d’étudiants que nous poussons à acquérir un savoir scientifique et technique au cours de cette année universitaire afin qu’ils puissent valider un diplôme, à défaut de s’établir sur une nouvelle planète à terraformer et à coloniser.
Sur le campus, des herbes folles ont envahi les abords des bâtiments, les jardiniers ne se sont pas encore occupés de l’entretien. Cela fait penser au champ de blé laissé à l’abandon sur la planète découverte par le Covenant.
Et soudain, en passant à côté de ces hautes herbes, je me suis fait infecter, à la manière des nano-machines à l’allure de spores du dernier opus en date de la saga Alien.
Essayez d’imaginer un instant qu’un corps étranger entre dans votre oreille et cherche à creuser un chemin jusqu’à votre cerveau... Vous aurez ainsi une petite idée de mon état de panique en rebroussant chemin, affolé, interpelant des collègues afin de trouver de l’aide. Bien entendu, rien n’était visible dans mon oreille, mais le bourdonnement dû à des battements d’ailes contre mon tympan avait de quoi expliquer ma crise. Incompréhension, appel sans succès auprès des pompiers et médecins urgentistes, attente insoutenable... J’ai décidé de régler le problème tout seul, un peu à la manière décrite dans « la Bête à Maît’ Belhomme » (comme quoi, les lectures de l’enseignement secondaire peuvent avoir une utilité inattendue), c’est-à-dire en vidant une bouteille d’eau dans mon oreille. Néanmoins, j’ai eu moins de chance que pour le paysan normand dépeint par Maupassant : la bête semblait toujours vivante et pas décidée à quitter mon oreille. En vitesse, je me suis rendu sur un autre bout du campus afin d’informer les collègues — qui m’attendaient pour un jury — de mon infortune et de mon retard, et j’ai réussi à trouver une infirmière à qui expliquer mon problème. Je me suis donc retrouvé allongé sur un lit d’auscultation, la tête sur le côté, l’oreille remplie de sérum physiologique. Cela a eu pour effet de faire cesser les battements d’ailes, mais pas moyen de sortir l’insecte noyé de mon conduit auditif.
La chemise trempée, j’ai retrouvé mes collègues et j’ai chamboulé l’ordre de passage des soutenances afin de quitter rapidement le campus pour rentrer chez moi et trouver un médecin.
Ce n’est que le lendemain matin que j’ai pu voir mon médecin traitant qui m’a confirmé voir un cadavre d’insecte volant collé à mon tympan. Son extraction avec une pince s’étant avérée à la fois inefficace et très douloureuse, mon médecin a réussi à m’obtenir un rendez-vous avec un spécialiste pour la fin d’après-midi. Les heures se sont écoulées lentement durant toute la journée avec cette gêne jusqu’au moment où j’ai pu voir l’ORL. Un petit coup d’aspirateur dans l’oreille, et hop, en un rien de temps, mon problème était réglé. J’étais soulagé de voir qu’il ne s’agissait que d’une banale mouche, et non d’un des multiples avatars du célèbre xénomorphe.
C’est ici que s’arrêtent les points de comparaison entre ma vie et le film Alien : Covenant.
Ou presque.
Oui, tout comme Peter Weyland, j’effectue des travaux de recherche qui ont des applications dans le domaine de l’intelligence artificielle...


Lundi, le 19 novembre 2012
L’IA, les robots et moi (créateurs, créatures, et cætera)
Il y a 10 ans, je venais de crĂ©er ce blogue. À cette Ă©poque, je m’apprĂŞtais Ă  soutenir une thèse dans un domaine dĂ©rivĂ© de l’intelligence artificielle et je me posais des questions sur mon avenir. Dix ans plus tard, je suis toujours autant intĂ©ressĂ© par l’intelligence artificielle et mon mĂ©tier d’enseignant et chercheur me permet de faire de jolies rencontres, comme revoir le mois dernier lors d’une confĂ©rence quelqu’un qui avait Ă©tĂ© l’auteur d’un essai fondamental sur l’IA que j’avais lu avec passion dans mes premières annĂ©es d’études universitaires, puis, bien des annĂ©es plus tard, avait Ă©tĂ© un de mes professeurs du temps oĂą j’étais encore un Ă©tudiant parisien, et qui est dĂ©sormais un collègue. Il m’avait alors confiĂ© qu’il devait participer en tant qu’invitĂ© aux dernières Utopiales afin d’intervenir sur une table ronde dĂ©diĂ©e au sujet des morales humaines et lois robotiques dans l’œuvre d’Isaac Asimov...
En mars 2012 s’était dĂ©roulĂ© Ă  Lyon le sommet europĂ©en de robotique « InnoRobo ». Mon intĂ©rĂŞt pour l’intelligence artificielle (l’IA) et la robotique ne date pas d’hier : tout jeune adolescent, j’étais dĂ©jĂ  fascinĂ© par les œuvres de science-fiction Ă©voquant des crĂ©atures artificielles, qu’il s’agĂ®t de grosses machines avec de simples boutons lumineux clignotants – comme le « Colossus » du film le Cerveau d’acier de Joseph Sargent sorti en 1970 (et adaptĂ© du roman Colossus de Dennis Feltham Jones) –, de robots vaguement humanoĂŻdes – comme « Robby » de la Planète interdite de Fred McLeod Wilcox en 1956 –, ou que les machines fussent si semblables aux ĂŞtres humains que seuls des tests très poussĂ©s permettaient de les distinguer de nous – comme les « rĂ©plicants » dans Blade Runner de Ridley Scott sorti en 1982 (adaptĂ© des AndroĂŻdes rĂŞvent-ils de moutons Ă©lectriques ? de Philip K. Dick).
J’éprouvais dĂ©jĂ  pour les crĂ©atures artificielles une rĂ©elle fascination, un mĂ©lange curieux d’admiration et de crainte, que je dois Ă  la tradition judĂ©o-chrĂ©tienne et Ă  l’hĂ©ritage culturel grĂ©co-romain qui m’ont façonnĂ©. Or c’est peu dire que la Bible n’est pas tendre avec ceux qui se permettent de rĂ©aliser des crĂ©ations qui nous ressemblent, car cet art est rĂ©servĂ© Ă  Dieu seul : « Dieu crĂ©a l’homme Ă  son image, il le crĂ©a Ă  l’image de Dieu, il crĂ©a l’homme et la femme. » (Genèse 1:26). L’Ancien Testament est bourrĂ© d’interdits sur la rĂ©alisation de crĂ©ations nous ressemblant : « Tu ne te feras point d’image taillĂ©e, ni de reprĂ©sentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre » (Exode 20:4, mais on retrouve des propos similaires aussi en LĂ©vitique 26:1, en DeutĂ©ronome 4:25 ou 5:8, etc.). À ce propos, je devrais aussi m’interroger pour mon attrait pour les arts plastiques, et en particulier pour la sculpture et le modelage de l’argile... Dans la mythologie grecque, le destin est tragique pour l’être lĂ©gendaire qui aurait Ă©tĂ© Ă  l’origine de l’humanitĂ©, Ă  savoir le Titan PromĂ©thĂ©e. Après avoir crĂ©Ă© les hommes Ă  partir d’argile et d’eau, il vole le Feu de l’Olympe (symbolisant la connaissance) aux dieux pour en faire don aux hommes, dĂ©clenchant le courroux des dieux qui l’enchaĂ®nèrent Ă  un rocher oĂą un aigle venait chaque jour lui dĂ©vorer le foie.
De fait, les histoires de créatures intelligentes se terminent mal, en général, et les créateurs qui osent braver l’interdit sont remis à leurs places de simples mortels le plus souvent de manière très cruelle.
Les premières crĂ©atures appelĂ©es « robots », qui sont plutĂ´t des androĂŻdes, sont celles que l’on retrouve dans la pièce de théâtre R.U.R. de l’auteur tchèque Karel Capek... Je pense que ce n’est pas trop dĂ©florer l’histoire que de dire que, Ă  la fin de la pièce, les robots se rĂ©voltent et finissent par anĂ©antir l’humanitĂ©.
Les crĂ©atures artificielles qui ressemblent Ă  l’homme, on en retrouve aussi des traces dans la tradition juive avec le Golem, ce « second Adam » d’argile prenant vie par le pouvoir magique du rabbin le Maharal de Prague. En dĂ©truisant le Golem, le rabbin aurait Ă©tĂ© Ă©crasĂ© par la masse de sa crĂ©ature.
Dans Frankenstein ou le PromĂ©thĂ©e moderne, Ă©crit en 1818 par Mary Shelley, la science reprend la place qu’occupait auparavant la magie, et on sent dans ce texte que l’arrivĂ©e de l’électricitĂ© permettait d’imaginer toute forme de pouvoirs, dont celui de donner vie Ă  une crĂ©ature composĂ©e de parties de corps humains dĂ©cĂ©dĂ©s. LĂ  encore, le rĂ©cit se termine par la mort du crĂ©ateur (qui traquait sa crĂ©ature qui ne faisait que semer la dĂ©solation autour d’elle), et l’horreur inspirĂ©e par cette histoire Ă©tait telle qu’une confusion a fini par s’établir entre la crĂ©ature et le crĂ©ateur, « Frankenstein » dĂ©signant pour la plupart des gens le monstre au lieu du scientifique qui Ă©tait parvenu Ă  crĂ©er une telle abomination.
Au moment oĂą l’homme mettait le pied sur la Lune, Stanley Kubrick sortait son film 2001, l’OdyssĂ©e de l’espace (au scĂ©nario inspirĂ© de nouvelles Ă©crites par Arthur C. Clarke). Le vaisseau spatial Ă©tait assistĂ© par une intelligence artificielle appelĂ©e HAL 9000. Les astronautes, comprenant que l’IA Ă©tait en train de dĂ©railler, avaient dĂ©cidĂ© de la dĂ©sactiver... mais celle-ci, ayant pu lire leurs intensions sur les lèvres, avait essayĂ© de les supprimer.
On peut noter que la seule manifestation de HAL, outre sa voix et son contrĂ´le du vaisseau spatial, est son œil rouge, nĂ©cessairement menaçant, comme l’est celui du robot Terminator quand il est dĂ©barrassĂ© de son enveloppe humaine.
Dans la saga des films Terminator, dont le premier volet avait Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© par James Cameron en 1984, le concept est toujours le mĂŞme – des mĂ©chants robots viennent pour dĂ©truire l’humanitĂ© et il ne reste qu’une poignĂ©e d’humains pour lutter contre les machines – mais l’histoire se complique par des voyages dans le temps pour revenir dans le passĂ© afin de changer l’issue de cette bataille. Suivant les Ă©pisodes, le Terminator venait du futur soit pour tuer le leader de la rĂ©volution, soit pour le protĂ©ger.
Dans les annĂ©es 1970 et 1980, mĂŞme si on rencontrait en Occident des robots moins mĂ©chants (comme « R2D2 » et « C6PO » de la saga la Guerre des Ă©toiles), c’était surtout les influences orientales (oĂą le robot est vu plutĂ´t comme un compagnon que comme une crĂ©ature soumise Ă  un maĂ®tre) qui vinrent changer le regard que nous portions sur les crĂ©atures artificielles, comme Astro le petit robot (Astroboy dans sa version originale japonaise) ou « Nono » de la sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e d’animation franco-nippone Ulysse 31.
On commençait Ă  faire apparaĂ®tre des robots plus gentils Ă  partir du moment oĂą ces derniers devenaient plus « humains », ou en tout cas quand ils perdaient un peu de leur rationalitĂ© initiale au profit de l’émotion. On trouvait ainsi « Johnny 5 », dans Short Circuit de John Badham, sorti en 1986, qui est un exemple intĂ©ressant de recyclage de la crĂ©ature de Frankenstein. C’est Ă  nouveau l’électricitĂ© qui provoque la vie en changeant un robot militaire et en lui donnant des capacitĂ©s Ă©motionnelles que l’on ne retrouve pas chez les artefacts ordinaires. Le robot est considĂ©rĂ© comme Ă©tant un humain parce qu’il est capable d’avoir de la sensibilitĂ© et de l’humour.
Bien plus tard, il y eu aussi « Andrew », le robot domestique de l’Homme bicentenaire de Chris Columbus, sorti en 1999, et adaptĂ© de la nouvelle Ă©ponyme d’Isaac Asimov. Tout au long des deux siècles oĂą se dĂ©roule cette histoire, le robot Ă©volue, il subit des modifications qui le font paraĂ®tre de plus en plus humain, et ce dernier se bat juridiquement pour chercher Ă  ĂŞtre reconnu comme un ĂŞtre humain Ă  part entière par l’humanitĂ©. Il y parvient au moment oĂą il acquiert enfin une caractĂ©ristique essentielle pour tout ĂŞtre vivant, c’est-Ă -dire la possibilitĂ© de mourir...
C’est d’ailleurs intĂ©ressant de voir que, dans les œuvres de fiction traitant de l’intelligence artificielle, les oppositions de base entre la vie et la mort, le crĂ©ateur et sa crĂ©ature, l’amour et la haine, ou le fait de donner la vie ou de tuer semblent perdre leurs frontières pour se mĂŞler, car on a un peu l’impression qu’une crĂ©ature artificielle ne peut ĂŞtre considĂ©rĂ©e comme intelligente que si elle est aussi vivante, et que donc elle a aussi la capacitĂ© Ă  mourir. C’est ainsi que Frankenstein finit par se faire tuer par sa crĂ©ature, ou que Tyrell, le crĂ©ateur des rĂ©plicants de Blade Runner, se fait Ă©craser la tĂŞte après un baiser de la mort donnĂ© par une de ses crĂ©atures qui souhaitait l’obliger Ă  modifier son caractère gĂ©nĂ©tique afin de prolonger sa durĂ©e de vie...
Ces jeux curieux entre la vie et la mort, la crĂ©ature et son crĂ©ateur, le fait de donner la vie et de tuer se retrouvent chez ce mĂŞme rĂ©alisateur qu’est Ridley Scott dans d’autres œuvres cinĂ©matographiques. DĂ©jĂ , dans le premier Alien sorti en 1979, on rencontre, en plus d’une intelligence artificielle assez basique chargĂ©e de piloter le vaisseau spatial et appelĂ©e « Maman », un androĂŻde cachĂ© parmi les humains appelĂ© « Ash ». Sans vouloir interprĂ©ter tout de façon freudienne, il est difficile de manquer dans ce film les jeux multiples sur la reproduction et la sexualitĂ©, avec une certaine obsession pour l’orifice buccal : les ĂŞtres humains sont contaminĂ©s par les aliens qui leur pondent un fœtus de crĂ©ature dans la bouche, les aliens sont pourvus d’une tĂŞte phalloĂŻde ainsi que d’une deuxième bouche rĂ©tractile dans leur bouche, l’androĂŻde Ash cherche Ă  Ă©touffer Ripley en lui introduisant un magazine dans la bouche en une parodie de scène de fellation, les androĂŻdes sont des machines dont les circuits sont alimentĂ©s par un liquide blanc et gluant...
On dirait vraiment que ces idĂ©es hantent le rĂ©alisateur amĂ©ricain car dans Prometheus, son dernier film en date, ces obsessions sur les modes de reproduction et sur l’artificiel sont encore plus criantes : si les machines androĂŻdes sont des crĂ©ations des humains, nous, les ĂŞtres humains, serions les crĂ©ations d’une espèce extra-terrestre appelĂ©e les « IngĂ©nieurs » ; l’origine de la vie sur Terre serait due au sacrifice d’un IngĂ©nieur qui aurait mĂŞlĂ© l’ADN de son organisme Ă  l’eau Ă  travers l’action de nanorobots ; ces mĂŞmes nanorobots seraient capables de contaminer un ĂŞtre humain pour le transformer en crĂ©ature zombiesque parvenant Ă  fĂ©conder une femme stĂ©rile ; un IngĂ©nieur sorti de son hibernation cherchera Ă  dĂ©truire les humains que son espèce est parvenue Ă  crĂ©er... Cette fois-ci, les monstrueuses crĂ©atures, ce sont nous, et nos crĂ©ateurs cherchent Ă  nous dĂ©truire comme avait tentĂ© de le faire le Docteur Frankenstein.
Sans dresser une liste exhaustive des œuvres de fiction (cinĂ©matographiques) oĂą sont prĂ©sentĂ©es des intelligences artificielles et leurs incarnations sous forme de robot (j’aurais pu parler d’I, Robot d’Alex Proyas qui est sorti en 2004 ou d’A.I. de Steven Spielberg qui est sorti en 2001), je crois que l’une des visions les plus rĂ©alistes mais nĂ©anmoins tordues qui soient sur les liens entre la nature et l’artificiel, le modèle et sa copie, se rencontrent dans le du film de science-fiction franco-espagnol Eva rĂ©alisĂ© par Kike MaĂ­llo et sorti en 2011 oĂą se mĂŞlent les sentiments humains d’amour, de jalousie et de haine dans un monde de petits gĂ©nies de l’intelligence artificielle et de la robotique.
Enfin, pour l’instant, nous n’en sommes pas encore là. Les robots que j’ai croisés au mois de mars de cette année sont plein de potentialités en terme de capteurs et de capacités d’action mais, à mon sens, ils sont encore loin d’être dotés de programmes pouvant leur donner un semblant de comportement intelligent...
Nao
« Nao » d’Aldebaran Robotics

Reeti
« Reeti » de Robopec

RoboThespian
« RoboThespian » de Engineered Arts Limited




Mardi, le 12 octobre 2010
Choisir, c’est...
En parcourant le document de travail rĂ©digĂ© par un collègue, je suis tombĂ© sur la phrase : « Choisir, c’est renoncer ».
J’ai fait remarquer Ă  mon collègue qu’il s’agissait d’un clichĂ© (mĂŞme s’il s’agit plutĂ´t de l’adaptation libre d’une citation d’AndrĂ© Gide), ce qu’il n’a pas très bien pris car cette notion reprenait avec justesse les idĂ©es qu’il souhaitait introduire. En guise de provocation et de dĂ©monstration par l’absurde, il a ainsi dit que « tout » pouvait ĂŞtre « renoncer », comme le fait d’avoir une Ă©rection.
C’est alors que j’ai poursuivi son idĂ©e, dĂ©truisant son argumentation dans un grand Ă©clat de rire mutuel : « bander, c’est renoncer... Ă  pouvoir pisser avant cinq minutes ».

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